La collection Elizabeth Pryce arrive à Paris

Elizabeth with 2 Huli warriors to Goroka show. © DR Sotheby's 

Qui est Elizabeth Pryce ?

Elizabeth est une pharmacienne australienne qui a découvert les arts d’Afrique et d’Océanie il y a plusieurs années en voyant un masque africain chez un couple d’amis. À partir de ce moment-là, elle a commencé à fréquenter les galeries australiennes, les salles de vente… et à former sa collection d’art Océanien. 

Ensemble d’œuvres de la collection Elizabeth Pryce © DR Sotheby’s

Comment la collection s’est constituée ? et sur quelle durée ?

La collection s’est formée sur près de cinquante ans. Outre les galeristes australiens, Elizabeth Pryce a énormément voyagé à Paris, à New York mais aussi, et surtout, en Papouasie-Nouvelle-Guinée car elle avait envie de comprendre d’où venaient ces œuvres, quels en étaient les artistes et donner ainsi un vraie sens à sa collection.

Comment la collection d’une collectionneuse australienne se retrouve en vente à Paris ?

Ensemble d’œuvres de la collection Elizabeth Pryce © DR Sotheby’s

Le choix de Paris s’est fait de manière assez évidente. C’est une des places fortes pour le marché tout particulièrement pour l’art Océanien. C’est à Paris qu’a eu lieu la vente de la collection Frum en 2014 qui a été un énorme succès et c’est aussi à Paris que se sont vendues les œuvres qui ont fait des prix record pour la spécialité.

Combien d’objets comporte la collection/vente ?
ces objets sont-ils exclusivement océaniens ?

Pour la vente nous avons fait une sélection de 150 œuvres qui montre bien la diversité de l’art océanien. La grande majorité des œuvres viennent en effet d’Océanie mis à part une dizaine d’objets provenant d’Indonésie et des Philippines.

Quelles sont les typologies et régions les plus représentées ?

Bouchon de flûte wusear, Biwat, rivière Yuat, Papouasie-Nouvelle-Guinée © DR Sotheby’s

La grande majorité des œuvres de la collection proviennent de Papouasie-Nouvelle-Guinée pour des raisons géographiques. La proximité avec l’Australie fait que beaucoup d’œuvres de cette région sont arrivées sur le marché à Sydney, beaucoup plus que des œuvres de Polynésie ou de Micronésie. Mais ces aires sont également représentées, il y a dans la collection un élégant peigne de l’île de Yap et aussi un petit plat cérémoniel de l’archipel des Fidji.Ce qui est très intéressant dans cette collection c’est qu’elle est majoritairement constituée d’objets qui illustrent le quotidien : peignes, appuis-nuque, spatules à chaux, plats… c’est un vrai panorama sur l’art de vivre en Océanie. Il y a notamment un très bel ensemble de mortiers à bétel, œuvres préférées d’Elizabeth qui, selon elle, lui rappelle son métier de pharmacienne.

Quel est l’/les objet(s) phare(s) de la vente ?

L’objet phare de la vente est un bouchon de flûte Biwat, de la région de la rivière Yuat qui illustre l’esthétique toute en force et en puissance des œuvres de Papouasie-Nouvelle-Guinée.Selon Markus Schindlbeck : « ces bouchons de flûte sculptés du Fleuve Yuat, un affluent du Bas Sepik, ont exercé une fascination particulière sur les voyageurs et collectionneurs européens dès les premiers contacts. Il est certain que ce n’est pas uniquement les formes de figures humaines sculptées à la tête large et au front allongé qui ont fait l’admiration de tous. Les yeux incrustés de nacre brillante, les défenses de cochon, les diadèmes de plumes de casoar, les épaisses barbes de cheveux humains attachés aux contours perforés du visage faisaient partie des ornements au même titre que les peintures et autres bijoux en coquillages et brassards et amplifiaient l’impact visuel de ces œuvres » (communication personnelle, août 2018).Acquis in situ à la fin des années 1940 par le peintre australien William Dobell le bouchon de flûte de la collection Elizabeth Pryce est resté dans l’atelier de l’artiste jusqu’en 1996, date où Elizabeth l’achète pour la collection. Il s’apparente très étroitement aux bouchons de flûte acquis par Margaret Mead au début des années 1930 et aujourd’hui dans les collections de l’American Museum of Natural History de New York (inv. n° 80.0/8243 et 80.0/8247)

Masques, Tukman, île You, Papouasie-Nouvelle-Guinée © DR Sotheby’s

Ces objets sont-ils toujours restés en collection privée ou certain ont été exposés lors d’expositions publiques ?

La plupart des œuvres de la collection Pryce sont restées dans sa collection. Cependant Elizabeth est l’une des fondatrice de l’Oceanic Art Society - elle en fut la vice-présidente - dont l’un des objectifs est de promouvoir l’art océanien. Elle a donc organisée de nombreuses expositions ; notamment Shields of Melanesia en 2000 au Sydney Art College où elle avait prêtée tout un ensemble de boucliers de sa collection.Le bouchon de flûte biwat a également été exposé à deux reprises, à la National Gallery of Australia de Canberra pour l’exposition Myth and Magic Art of the Sepik River et lors d’une rétrospective sur l’art du peintre William Dobell à la SH Erving Gallery de Sydney, Painter in Paradise : William Dobell in New Guinea.

Quel est ton objet coup de cœur ? et pourquoi ?

Il y a énormément d’œuvres qui me plaisent dans la collection pour pleins de raisons différentes mais j’ai vraiment été frappé par l’esthétique de deux masques originaires de l’archipel des Îles Schulten. Visuellement ils présentent toutes les caractéristiques stylistiques de l’art de Papouasie mais ils nous donnent également beaucoup d’informations sur les échanges rituels dans cette région. En effet au sein de cet archipel, un complexe d’échanges très structuré s’est installé entre les différentes îles. Si les noix de galip ou les porcs, nécessaires à l’organisation d’une grande cérémonie, sont les principales valeurs à circuler il arrive que d’autres biens intègrent le système. C’est le cas de ces deux masques, créés sur l’île de Koil et arrivés sur l’île de Yuo afin de participer aux cérémonies tangbal visant à assurer le succès de la pêche et la fertilité des potagers et des cocoteraies.

Outre leurs qualités esthétiques les œuvres de la collection d’Elizabeth nous renseignent ainsi sur la fonction et l’importance de l’art en Océanie et nous donnent à voir la diversité et la puissance des créations artistiques de cette région.

Interview de Pierre Mollfulleda réalisée par Clémentine Débrosse, août 2018.

La collection sera exposée au 76, rue du Faubourg Saint-Honoré chez Sotheby's Paris du 6 au 9 octobre 2018 de 10h à 18h. La vente aura lieu le 10 octobre 2018.

Pour plus d'informations : http://www.sothebys.com/en/auctions/2018/pryce-pf1838.html?locale

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