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The Pā Boys

Aujourd’hui, parlons cinéma !

     La société des Océanistes a récemment eu l’excellente idée, dans le cadre des différentes manifestations au musée du quai Branly – Jacques Chirac autour de la très belle exposition Océanie, de diffuser le film The Pā Boys dans la salle de cinéma du musée. La projection était accompagnée par une intervention du réalisateur, Himiona Grace.

       Himiona se présente, très humblement, après avoir soufflé dans le micro. Stéphanie Leclerc-Caffarel, la commissaire adjointe de l’exposition Océanie, lui sourit chaleureusement depuis le premier rang. Le réalisateur ne dit tout d’abord que quelques mots ; il est important que nous découvrions le film sans tarder – mais il promet de revenir dans la salle après avoir visité l’exposition, qui se tient dans la galerie Jardin du musée. Il s’échappe, et la lumière baisse.

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Affiche du film The Pā Boys.

     On entend l’océan Pacifique. L’un des personnages principaux, Danny, observe les vagues s’écraser sur la plage au crépuscule. On est immédiatement happé. En détournant le regard vers la côte, les yeux du jeune Maori se posent sur des chevaux qui rappellent ceux de Gauguin.

       C’est l’histoire d’une poignée de jeunes gens mordus de reggae. Tous sont issus de la culture maorie, mais chacun la vit différemment. Ce long-métrage d’une heure et trente-trois minutes (on ne les voit pas filer !) propose de les suivre sur les routes d’Aotearoa lors de la première tournée du groupe de musique qu’ils fondent au début du film, The Pā Boys.

         Danny, joué à merveille par Francis Kora, est un Maori sans racines. Sur l’affiche du film, on peut lire « What’s a man without his roots? (Qu’est-ce qu’un homme sans ses racines ?) ». Ayant été adopté par une famille de blancs, il a grandi sans apprendre la langue et les coutumes que maîtrisent tous ses compagnons de voyage, et lutte pour être intégré sans savoir ce qu’il recherche vraiment.

      Tau, interprété par Matariki Whatarua, est son antagoniste. La culture maorie, ça le connaît ; il a grandi dans un cocon familial qui entretenait des liens puissants, et angoissants (nous vous laisserons découvrir pourquoi lorsque vous lancerez la lecture du film ce soir, bien installés dans votre canapé), avec ses ancêtres et leurs manifestations invisibles mais tangibles.

       L’hypnotisante Jo est jouée par Roimata Fox. Sœur de Danny, elle devient la manager du jeune groupe à succès et les accompagne dans leur tournée à travers Aotearoa pour gérer les relations publiques. Une personnalité aussi charmante que bienveillante.

      City boy – un surnom, comme vous vous en doutez sans doute – est un jeune Maori plein d’énergie et fumeur d’herbe, très connecté à ses racines. Il a eu la chance de grandir et d’étudier au sein d’une Kura Kaupapa Maori, c’est-à-dire une école maorie. Là, les enfants y apprennent dès l’âge du primaire français la langue et les coutumes maories. Bon vivant, il est le trickster du groupe et le compagnon de Jo. Il est joué par Tola Newbery.

       Enfin, Puti, une jeune femme proche du groupe qui se révèle être l’ex-compagne de Danny, rejoint la tournée par surprise, ce qui n’est pas sans pimenter l’épreuve émotionnelle que ce dernier traverse au cours de ces quelque une heure et trente minutes. Elle est jouée par Juanita Hepi.

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De gauche à droite : Danny, au chant et à la basse, City boy, au micro et à la batterie, Tau, au chant et à la guitare.

     Le film est une réussite en ce qu’il est à la croisée des chemins de plusieurs ambiances, qui s’équilibrent remarquablement. Ce n’était pourtant pas gagné !
The Pā Boys est léger par sa musique, le reggae, qui berce avec bonne humeur le voyage des cinq protagonistes à travers Aotearoa. Le casting est solide sur ce point : Francis Kora, Matariki Whatarua et Tola Newbery, jouant respectivement Danny, Tau et Cityboy, sont tous trois chanteurs.
The Pā Boys est également grave, par les sujets qu’il aborde : reconnaissance de l’identité maorie, menace des ancêtres avec Tau qui doit faire face à son héritage familial.
The Pā Boys est aussi troublant, face à Danny qui semble hésiter entre le monde mystique avec lequel ses compagnons sont si familiers et le terre-à-terre qu’il connaît par cœur. Attiré par les coutumes maories comme par un aimant, il ne sait pourtant pas comment se les approprier.
Bref, un poétique récit initiatique sur fond de road trip qui n’est pas sans rappeler l’ambiance de Sur la route de Jack Kerouac, et une parenthèse bienvenue qui permet de comprendre un peu mieux cette nouvelle génération maorie parfois déchirée dans sa recherche d’appartenance.
Finalement, le film pose une question essentielle : qu’est-ce qu’être Maori aujourd’hui ? On vous laisse le découvrir grâce au film.

       Au musée du quai Branly, Himiona Grace, le réalisateur du film, nous a donné un aperçu de la réponse en nous expliquant, après quelques questions du public (dont la nôtre !), que chaque personne étant intervenu doit « clean the air », c’est-à-dire clore la parole en disant quelques mots en Maori. À la demande d’Himiona, la trentaine de personnes présente se lève. Sur ses instructions, nous répétons respectueusement ses mots, sans les comprendre mais en comprenant leur importance.

Elsa Spigolon

Image à la une : Affiche du film The Pā Boys.

Où trouver The Pā Boys ?

Maintenant que nous vous avons donné envie (en tout cas, on l’espère !) de regarder ce film, voici quelques pistes pour vous aider à le trouver en ligne.

En attendant, vous pouvez toujours découvrir gratuitement la (très bonne !) musique du film sur Spotify : https://open.spotify.com/album/1HQTCiYRPGPRFcFhOflQu5, ou encore sur Apple Music (service payant) : https://music.apple.com/us/album/music-from-the-p-c4-81-boys/814897902

Si vous souhaitez soutenir le très humble Himiona Grace, vous pouvez également acheter l’album dématérialisé (nous l’avons fait !) sur l’iTunes Store français pour 5,99€. https://music.apple.com/us/album/music-from-the-p-c4-81-boys/814897902

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